
PROJETS
Films / vidéos / installations vidéos
Une longue phase de recherches empiriques, parfois utopiques, souvent alambiquées, précède généralement le temps de production. Ces recherches suivent des méandres horizontales où la science et les connaissances admises ne prennent pas le dessus sur l’expérience spontanée et les tentatives désordonnées. C’est alors à la façon des rhizomes que se déploient les informations trouvées, les influences ou les conseils rencontrés, les sentiments et les intuitions qui permettront la genèse du projet.
J’évite de porter un regard abstrait et un esprit scientifique sur ce qui apparait autour de moi, sur ce que je glane et cueille, préférant les chemins dessinés par les symboles, le hasard, l’intuition, le racontar ou le mythe, ou tout autres savoirs populaires, et non hégémoniques.
Par ailleurs, il m’intéresse que la création de projets artistiques advienne dans un état particulier, propice et sacré. Les pièces seraient alors le témoignage d’une recherche ou d’un état atteint, la concrétisation matérielle ou physique d’expériences sensibles.
Le projet est alors un condensé sensible, la preuve de ce cheminement mais aussi le moyen de prolonger et transmettre l’expérience vécue.
J’aime utiliser des matériaux peu transformés, simples et humbles comme le sont la terre, le bois, la corde ou le sable. En eux, ils portent l’histoire des premiers gestes humains, et notre corps les comprend et les connais.
Mais au travers de la vidéo et du film, j’entretiens aussi un rapport avec des matériaux plus technologiques et très éloignés de la nature et du vivant. Je vois alors ces médiums comme des outils par lesquels il est possible - il s’agit d’une petite triche à mes yeux - d’étendre son champ de perception et de transmission, et de garder ce que ma mémoire pourrait laisser filer.
Par ailleurs, le vivant a sa place dans mon travail et mes recherches : le végétal y est très présent, car à lui seul il fait Monde. Les matériaux issus des animaux y sont absents, en particulier ceux qui ne peuvent exister que par la mort de l’animal.
Je suis végane.
J’insiste sur l’engagement éthique lors du choix de mes matériaux, car je ne veux pas concevoir un projet sans avoir une connaissance de ce qui le compose et des implications sous-jacentes. Il me semble fou d’utiliser des matériaux issus de la pétrochimie.
La performance et l’action ont aussi une place très importante dans mon travail. Elles sont le lien nécessaire avec l’autre, l’acte quasi-rituel qui rassemble et qui pose la question du geste, de la présence et de la responsabilité de l’artiste.
Elles me semblent inévitables tant elles sont des moments de justesse, de risque, de vérité et de partage.
Bien souvent j’axe mes recherches sur l’humain et son rapport au monde dans le passé, comme dans le présent ou le futur. J’interroge le processus d’humanisation, quelle espèce animale sommes-nous ? Le processus d’humanisation est ce par quoi, nous prenons génération après génération de la distance vis-à-vis des autres primates, l’acte rituel me semble être un des points clefs de ce processus d’humanisation, d’autant plus que le rite définit les sociétés, insère l’individu. Comment le rite apparait-t-il dans cette évolution qui ne cesse de se prolonger ? Le rite qu’il soit quotidien, magique, métaphysique, culturel, religieux ou sociétal renforce le groupe autant que l'individu, son histoire et ses croyances.
A propos de mon travail filmique :
Pour définir en peu de mots les questions que j’aborde au travers de mes films, je dirais qu’il m’intéresse de traiter la transmission des savoirs, mais aussi comment ils apparaissent et comment ils disparaissent dans l’histoire de l’humanité. Plus précisément, je suis à la recherche de formes ancestrales persistantes. Je les traque dans les mythes, les superstitions et les épopées, dans les dessins et les danses innocentes de ma fille, dans les états seconds ou hypnotiques que génère la contemplation du feu, ou encore dans les usages que les humains font des plantes. Cette recherche est polymorphe, généralement filmique, elle se développe sous la forme de documentaires : Kitikaka, Lupita, Petits Cailloux Noirs. Mais aussi sous forme de journaux filmés : Les Chatons, Là où je dormais, ou encore de films expérimentaux : La Nuée, La Maison Goëtie, Le Lait. Puis parfois cette recherche apparaît dans des installations : La Petite Nuit.
Il y a des gestes très simples :
- cuisiner
- faire du feu
- pétrir, tourner l’argile
- enterrer
- cueillir
- se déguiser
- tisser
- chanter.
Des gestes plus élaborés :
- filmer
- enregistrer
- monter
- projeter.
Dans mon atelier
il y a :
- des vieilles caméras mini dv qui ne fonctionnnent plus,
- d'autres qui veulent bien s'allumer de temps en temps,
- des poils d'un chameau rencontré sur un rond point,
- une collection de bassines en plastique jaunes ou turquoises,
- un monstera titanesque avec des racines merveilleuses,
- des cassettes audios de chants béarnais et basques,
- des pigments naturels,
- de la chaux grasse,
- du plâtre de Paris,
- des pains d'argiles,
- des encres à marbrer,
- une collection de cartes postales couleurs,
- des anciens tissus fleuris,
- beaucoup de rubans et passementeries.